jeudi 30 mars 2017

Jean Lassalle éco-citoyen, régionaliste et résistant. LOCAL D'ABORD!

Personne ne prend au sérieux la candidature de Jean Lassalle à la magistrature suprême. Pour cause, le trublion de l'hémicycle est un ovni dans l'univers politique: il ne trimbale ni casserole, ni emplois fictifs, ni compte caché dans un paradis fiscal. Physiquement, le député des Pyrénées-Atlantiques a le gabarit d'une armoire à glace, un visage marqué, un nez fort. Sa voix est puissante à faire trembler les murs, bien qu'il s'en serve principalement pour chanter. Il ne ressemble à personne du sérail et n'a pas non plus d'étiquette politique depuis qu'il a claqué la porte du MoDem (dont il était vice-président). 

Pour aggraver son cas, son livre-programme "Un berger à l'Elysée", paru le 27 octobre aux éditions de la Différence, pourrait concourir à la course aux prix littéraires dans la rubrique Poésie. Plusieurs pages sont consacrées au sentiment douloureux de voir les saisons se métamorphoser, au respect oublié de la terre, de la paysannerie, de la ruralité. "J'adore regarder les paysages, j'adore regarder les gens. D'une certaine manière, je suis un romantique" avait-t-il déclaré au micro de France Culture lors de sa fameuse marche sur les routes de France. Comme tout paysan, il pense que la terre a une âme et il voudrait nous la faire entendre. 

Mais Lassalle s'est fait connaître du grand public par ses excès. En 2006, pour empêcher la délocalisation d'une usine dans la vallée d'Aspe dont il est originaire, il fait une grève de la faim dans la salle des Quatre colonnes du Palais Bourbon, (il perd 32kg en 39 jours). En 2013, il entame une marche de 9 mois à travers la France pour aller "à la rencontre des Français". A présent, il se déclare candidat à présidence de la République, sans argent et sans troupe. 

Les cyniques contre lui

Alors forcément, certains se rient de lui comme on se rit de ceux qui chantent pour repousser une tragédie. Ils rient sur le ton du mépris et de la condescendance: le Béarnais n'est peut-être pas assez mafieux pour gagner leur respect. Pourtant les propositions de son programme sont empreintes de bon sens: un moratoire sur la dette, la renégociation des traités européens, le désengagement militaire des opérations extérieures. "La construction européenne se désagrège comme un édifice lézardé, un mauvais béton sur de trop petites fondations. La force ne vient pas du conglomérat. La force vient d'une confiance profonde" écrit Lassalle dans son livre. 

  "La force vient d'une confiance profonde" écrit Jean Lassalle. 

Il dénonce l'argent, la financiarisation du monde, la perte de la place de l'homme, la domination par la technique. La délocalisation des usines, la globalisation, l'économie spéculative, les fusions-acquisitions, bref: tout ce qui broie l'homme le plus faible. Loin de se prendre pour un surhomme prométhéen, il espère simplement laisser une trace pour éviter la tragédie annoncée. "Lorsque le ciel vire au plomb, il semble que les démocraties ne trouvent plus les mots pour formuler l'intuition des peuples, pour les préparer à se défendre. Elles abandonnent aux démagogues l'expression de la sensibilité et de la souffrance des hommes" écrit Lassalle.


lundi 20 mars 2017

Chaque année, au printemps, est célébrée la Journée internationale de la Francophonie

Les 274 millions de francophones sur les 5 continents fêtent leur langue en partage et la diversité de la Francophonie à travers des concours autour des mots, des spectacles, des festivals de films, des rencontres littéraires, des rendez-vous gastronomiques, des expositions artistiques... Cette date a été choisie en référence au 20 mars 1970, marqué par la création à Niamey (Niger) de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), future Organisation internationale de la Francophonie. Les événements dans le monde : http://www.20mars.francophonie.org/tous-les-evenements.html

mercredi 15 mars 2017

Du petit-fils de berger au berger .... les autres sont des moutons ... mieux vaut suivre le berger!

Fils de berger, berger moi-même jusqu’à 22 ans, aujourd’hui frère de berger, je sais que mes engagements sur ces sujets ont suscité des interrogations et des oppositions aiguës. Je ressens ces réactions comme un signe que nos contemporains ont perdu la trace de la nature : que ressent-on, en ville, des saisons ? Qui saurait, dans les montagnes ouvertes aux loups et aux ours, garder les brebis ? 
Certaines des organisations internationales qui se revendiquent de la cause animale, ou de la protection de la nature, se sont transformées en ambassadrices d’un « capitalisme vert », et même en commerçantes de droits à polluer. Leur communication joue sur le sentiment de ceux qui souffrent d’être, dans les grandes villes, agglutinés et pourtant seuls ; ceux qui gardent au fond d’eux l’amour de la nature qu’ils ne connaissent plus. 
Mais n’est-ce pas précisément l’évolution actuelle du capitalisme, son productivisme effréné, qui pille nos ressources naturelles ? L’ampleur des problèmes qui nous assaillent n’impose-t-elle pas de s’en prendre à ce système ? Le végétal a été industrialisé. On a breveté les plantes, qui auparavant appartenaient à tout le monde. L’animal a perdu sa ferme familiale pour d’immenses étables, d’immenses abattoirs, suivis de non moins immenses entrepôts, destinés à la surconsommation d’une partie seulement de l’humanité. 
Mon expérience m’a fait découvrir une autre voie. Celle où s’engagent des hommes décidés à gérer ensemble leurs biens communs, qui refusent de se laisser déposséder. Nous devrons revenir à cette gestion commune des biens communs si nous voulons libérer la nature de la financiarisation. Nous devrons assumer nos responsabilités d’humains et de citoyens. 

Je me souviens de mes premiers pas dans la haute montagne, aux côtés de mon père. Le troupeau dormait à la belle étoile, juste à côté de la modeste cabane dans laquelle nous vivions, que l’on appelle aussi cayolard. Je vivais d’incroyables soirées, où le ciel s’empourprait avant de s’éteindre très progressivement pour allumer ses constellations d’étoiles. Ce rêve éveillé pouvait virer au cauchemar en quelques minutes, quand l’orage s’abattait, toujours avec violence, installant dans son sillage une brume épaisse et humide. C’est à ce moment-là que l’ours attaquait, presque toujours la nuit. Le troupeau terrifié se jetait en masse sur la cabane, comme une déflagration. Mon père se réveillait en sursaut, sortait le bâton à la main. En son absence, mon cœur éclatait dans ma poitrine, de peur. Mon père revenait une demi-heure plus tard, toujours avec la même fureur. Il s’apaisait tandis qu’il me murmurait, blotti contre lui, des mots d’encouragement. Au fond, il n’aimait pas l’ours, mais l’ours faisait partie de la création, au même titre que l’homme, et il n’avait jamais imaginé voir cet équilibre disparaître. 
Jusque dans les années 1990, les habitants des vallées d’Ossau et d’Aspe, la mienne, étaient assez fiers d’avoir été les derniers à maintenir l’espèce des ours bruns des Pyrénées. Mais l’État a voulu y créer, en faveur des ours, une « réserve intégrale » interdite aux humains. Cela a dressé les montagnards contre l’oukase, et contre les associations de protection de la nature, qu’ils accusaient d’avoir mis le feu aux poudres. 
J’ai raconté cette histoire dans mes livres. Au final nous avons créé, entre communes de nos vallées, une institution locale, l’Institution Patrimoniale du Haut-Béarn, où tout le monde a pu s’engager : tous les utilisateurs de la montagne, bergers, forestiers, chasseurs, randonneurs, l’ensemble des services et administrations de l’État, les associations de protection de la nature. Des experts de renommée nationale et internationale ont participé aux travaux. Nous avons abattu un travail formidable, tant en faveur des bergers qu’en faveur des ours, construisant des cabanes pour les premiers, plantant des arbres fruitiers pour les seconds. Le 19 décembre 1996, à 5 heures du matin, nous avons voté la réimplantation de deux ours, en demandant le concours de l’État. Malheureusement, l’État a pris le chemin inverse : celui de la marchandisation, et de l’affrontement. Comme l’Europe avec sa directive « Habitats », l’État a voulu transformer nos montagnes en domaine pour des espèces de fauves, qui ne sont pourtant plus en voie de disparition. Les bergers sont interdits de défendre leurs troupeaux. Les communautés locales sont dépossédées. La vie s’éteint. Vous le comprenez, je crois être dans cette campagne un défenseur authentique, absolu, de la nature et de l’écologie. L’écologie que j’ai connue dès mon enfance cherche des équilibres. Ces équilibres doivent évoluer avec le temps, mais en gardant précieusement le sentier que nos pères nous ont légué. 
Aujourd’hui, de plus en plus de personnes, et de médias, s’intéressent au bien-être des animaux. J’en suis très heureux. C’est une chance pour les paysans, les éleveurs, et tous ceux qui travaillent dans ces secteurs. Le fonctionnement des marchés mondiaux a poussé notre agriculture et nos filières dans un productivisme à tout crin, qui a fait le malheur des paysans eux-mêmes. C’est aussi la cause des crises sanitaires qui s’enchaînent. La situation actuelle conduit certains à se demander si l’on peut encore manger de la viande ! Pour un fils d’éleveur transhumant, ça fait mal. Bien sûr, personne ne devrait être obligé de manger de la viande : si les cantines scolaires, et la restauration collective en général, proposent des plats végétariens en donnant le choix, c’est très bien. Mais ce qui me fait le plus plaisir, c’est que les consommateurs s’intéressent à ce qu’ils mangent, se demandent d’où cela vient, de quel terroir : à ce moment là, ils commencent à permettre le retour d’une agriculture de qualité, attachée au respect des bêtes et des plantes. 

Je suis très favorable à l’élevage en plein air, le seul que j’aie pratiqué. Je crois que nous pouvons retrouver dans tous les élevages — de volaille, de bovins, de porcins, etc. — des conditions compatibles avec les besoins des animaux. Et si les règles de la politique agricole, la PAC, l’empêchent, ce sont ces règles qu’il faudra changer, au moins en France pour ce qui nous concerne. Nous devrons le faire en respectant les éleveurs qui ont récemment acheté des équipements et se sont endettés, souvent pour dix ans, et qui ont observé toutes les réglementations déjà si nombreuses ! 
Le broyage des poussins mâles fait partie de ces pratiques que la pression économique a établies et qui devraient être évitées. J’avais cosigné en 2015 une question écrite au Ministre, à ce sujet, rappelant qu’une méthode de prédétermination prénatale des sexes des poussins est en vigueur dans d'autres pays, et permet d’éviter cette pratique. Une autre pratique qui peut effrayer, est celle des expérimentations médicales sur des animaux pour tester les médicaments destinés aux humains. Cette expérimentation animale est indispensable, mais nous devons veiller à ce que les expérimentations respectent au mieux les animaux. Et nous devons privilégier les méthodes alternatives, ou en chercher là où elles manquent. Tous ces sujets montrent le danger des traités dits « de libre-échange » comme TAFTA ou CETA, qui ne considèrent que le produit commercialisé (que ce soit un fromage ou un médicament) : ils nous empêcheraient d’établir nos propres règles, sans quoi nous ne serions plus « concurrentiels »… Ils permettraient aux multinationales de déséquilibrer encore plus la mondialisation, de la plier à leurs intérêts. Résistons à ces multinationales, à leur propagande et à celle des ONG qu’elles financent ! Inventons pour nos campagnes un autre avenir que celui auquel les destinent des traités et des directives qui, au nom de la « liberté », ne savent qu'interdire ! Et restaurons la nature en ville, car les villes ont, elles aussi, besoin de revivre ! C’est aussi, et peut-être surtout, une affaire d’éducation. Sortons les enfants des salles de classes ! Mettons-les en contact avec les réalités ! Je souhaite que tous les élèves aient l’occasion, et pas seulement trois jours dans la scolarité, de vivre la vie de la ferme ; qu’ils apprennent à planter comme à arracher, à traire la vache ou à brosser le cheval. Peut-on vivre seulement dans le virtuel ? Peut-on être heureux ainsi ? Je sais bien que l’opposition est vive entre les associations qui s’expriment sur ces sujets. Je sens monter les tensions et les inquiétudes. Dans nos campagnes, nos montagnes, dans nos ports, des hommes se sentent menacés de disparition. Ils craignent d’être réduits au rang de gardiens de zoo. Ils ont peur pour les lieux où ils sont nés, et qu’ils aiment. Le sort de la nature fait remonter, dans notre société moderne, des émotions venues d’un passé lointain. Ce ne sont pas des conflits entre les animaux et les hommes, mais bien des conflits entre hommes ! Je ne prétends pas apporter une formule magique qui satisferait instantanément tout le monde. Mais je suis certain que si nous nous parlons, non pas dans des salons mais à la ferme, si nos enfants refont l’expérience de la vraie vie, si nous prenons le temps, nous retrouverons confiance, et nous reconstruirons un monde où les animaux, eux aussi, auront leur juste place. Nous partageons, du cœur des villes aux plus petits hameaux, le devoir de protéger la nature. C’est un principe politique qui dépasse l’administration et même le gouvernement d’un moment. Cela n’efface pas le débat d’aujourd’hui et n’évite pas celui de demain : au contraire, cela y incite. Nous pouvons et devons nous retrouver pour en parler, pour comprendre comment notre civilisation transforme le monde, et décider ce que nous voulons faire ensemble. Je vous redis ici mes sentiments chaleureux et notre espoir d’un grand projet partagé par la France et les Français.
Jean Lassalle

jeudi 9 mars 2017

Lettre ouvert à Reporterre

A la suite à l'article de ce jour signé par Martin Cadoret. https://reporterre.net/Ces-mouvements-citoyens-qui-veulent-renouveler-la-democratie 

Nous publions cette lettre ouverte pour exposer que 100% EST aujourd'hui plus qu'un simple "mouvement à candidats". Nous représentons la seule force citoyenne présente sur la totalité du territoire à savoir 539 en France métropolitaine, 19 dans les départements d'Outre-Mer, 8 dans les collectivités d'Outre-Mer et 11 pour les Français de l'étranger. De plus, Podemos nous a identifié comme la seule fédération du mouvement citoyen moteur du changement social.

 100% rassemble plusieurs mouvements politiques, nationaux et locaux, notamment des mouvements citoyens et écologistes. Nous, Podemos français, présentons ensemble des candidats aux élections législatives car nous souhaitons des députés investis à "100%" dans leur mandat. Le non-cumul strict de mandat, l'exemplarité attendue des parlementaires - notamment sur le plan financier -, la transparence et l'absence de conflit d'intérêt avec des activités parallèles font partie des engagements et des exigences portés par nos candidats. Cette modernisation/transformation de la démocratie en France est au coeur des propositions d'une fédération où l'éthique et l'anti-corruption portent notre force éco-citoyenne. La reconnaissance du doit animal, du vote blanc comme un suffrage exprimé, l'utilisation du référendum d'initiative citoyenne, l'installation de Conférences citoyennes (électeurs tirés au sort) en lieu et place de Conseils économiques et sociaux régionaux désuets, l'abaissement des plafonds de dépenses électorales, ou encore la limitation du cumul dans le temps, sont autant de mesures qui permettront le renouvellement du personnel politique et l'arrivée d'idées nouvelles : un néologos, salvateur pour une société dédiée aux générations futures. Ces idées nouvelles sont nécessaires pour une transformation bienveillante de la société française. Le débat politique nous enferme trop souvent dans la répétition de vieux débats rendus le plus souvent obsolètes par les évolutions du monde contemporain.

A ce titre, "100%" se veut une pépinière d'idées politiques innovantes à expérimenter sur le terrain. Local d'abord a un sens! Nous croyons à une décentralisation plus forte de la société française, permettant notamment à ces idées de se concrétiser en région pour être évaluées puis, éventuellement partagées. Cette volonté de transformation bienveillante est éclairée par notre approche commune en matière écologique. La prise de conscience des enjeux environnementaux traverse tous les projets politiques. Nous ne voulons punir ou sanctionner mais promouvoir les moyens humains, les solutions techniques et industrielles qui nous permettront de nous libérer de la dépendance au pétrole, au gaz ou à l'uranium. Nous voulons renforcer les nouveaux modèles agricoles qui permettront de nous nourrir mieux et de préserver notre santé. Nous voulons renforcer les outils et moyens permettant de construire des logements autonomes sur le plan énergétique et, enfin, inscrire les villes dans une logique d'économie circulaire de leurs déchets. Cette force éco-citoyenne rassemble les mouvements impliqués dans 100%,leur permet de grandir face à l'écrasante oppression des partis traditionnels et de proposer une alternative électorale aux français.

lundi 6 mars 2017

Législatives : les Français de l’étranger privés de vote électronique pour des raisons de sécurité

Évoquant des risques de cyberattaques, le ministère des affaires étrangères a supprimé cette possibilité pour les législatives. 

Compte tenu « du niveau de menace extrêmement élevé de cyberattaques qui pourrait affecter le déroulement du vote électronique », ce dernier, dans le cadre des législatives, pour les Français vivant à l’étranger est suspendu, a annoncé le ministère des affaires étrangères, lundi 6 mars. « En raison de ce contexte, il a été jugé préférable de ne prendre aucun risque de nature à compromettre le scrutin législatif pour les Français de l’étranger », précise le ministère des affaires étrangères dans un communiqué, confirmant les annonces faites le matin même par le secrétaire d’Etat chargé du commerce extérieur, Matthias Fekl, devant l’Assemblée des Français de l’étranger. 

Des mesures spécifiques devraient être prises pour faciliter l’accès au vote, avec notamment une prolongation jusqu’au 31 mars de la date limite pour faire une demande de matériel de vote par correspondance. En France, le vote électronique existe depuis 2012 mais est réservé aux Français de l’étranger pour les législatives – le vote à l’élection présidentielle ne peut se faire que dans les bureaux installés dans les locaux consulaires ou par correspondance, essentiellement pour des raisons de sécurité.

dimanche 5 mars 2017

Avec Ariane Vitalis comme agent de liaison du mouvement citoyen

Des êtres complets (ARIANE VITALIS)

On disait d’eux qu’ils étaient des poètes. Pourtant, chaque jour, ils manageaient des dizaines de personnes avec une rigueur et une efficacité rares. Ils savaient prendre des décisions fermes et pragmatiques ; gérer des comptes complexes ; concevoir des stratégies et anticiper des situations. Ils savaient parler avec tact et diplomatie à des personnes dont l’univers comportait bien peu de poésie. La nuit tombée, ils retiraient leurs vestes, s’asseyaient parterre et regardaient le ciel. La grandeur de l’Univers les fascinait. Ils avaient lus tous les livres, entendus tous les opéras, vus tous les films : ils savaient que la plus grande symphonie demeurait dans l’observation silencieuse. Complices, ils échangeaient quelques paroles et se taisaient à nouveau. Ils étaient. 
Chaque matin, ils remettaient leurs plus beaux habits et accomplissaient avec conviction ce qui était leur travail. On disait souvent d’eux qu’ils étaient inspirants. Ils éprouvaient une amitié profonde et sincère pour toutes les personnes qui les entouraient. Ils dînaient aux plus belles tables, parlaient des choses du monde avec sérieux et responsabilité ; et puis, le lendemain, ils étaient de nouveau des enfants avec leurs frères et sœurs de lait. Ils avaient huit ans, de nouveau. Ces frères et sœurs de lait étaient des anges pour eux. C’étaient leurs anges. C’étaient les êtres qui, depuis plus de vingt ans, étaient toujours là. Toujours là pour vous ouvrir la porte, pour vous aimer comme vous êtes, quoi que vous soyez devenus. Ils se regardaient dans les yeux, souriaient, grimaçaient grotesquement puis riaient soudain, et finissaient toujours par éclater de rire. C’était une douceur exquise de voir que, dans ce monde mouvant, quelque chose demeurait inébranlable. L’amitié de nos amis d’enfance. Ils voyageaient. Ils rêvaient, s’évadaient dans leurs idéaux et dans leurs utopies. Émotifs, ils pleuraient un peu, par moments. Et puis, ils reprenaient leur travail ; fatigués parfois, mais toujours convaincus de l’absolue nécessité de leurs actions. 

Un jour, un homme vint vers eux et leur dit : « Il y a quelque chose que je ne comprends pas chez vous. On dit de vous que vous êtes des poètes, des artistes, des créatifs… et pourtant, vous êtes aussi des gestionnaires, des administrateurs, des managers… n’y a-t-il pas un paradoxe ? » Ils se tournaient l’un vers l’autre et se jetaient un regard complice. C’était une des choses dont ils étaient heureux. Ils étaient des poètes, des créatifs, des artistes ; mais ils étaient aussi des managers, des gestionnaires, des administrateurs. Ils étaient scientifiques et spirituels ; ils étaient des adultes et des enfants ; ils traînaient dans la boue et se réjouissaient des mondanités ; ils appréciaient avec autant de saveur les conversations qu’ils avaient avec des savants et celles qu’ils avaient avec les gens qui parlaient fort dans les bars, joyeux. Ils voyaient le monde dans son extrême diversité et ne voulaient pas passer à côté de cette richesse. On disait d’eux, parfois, qu’ils étaient des êtres complets. 

Complet : Qui comporte tous les éléments nécessaires, à quoi rien ne manque. (Larousse)

Complémentaire : Qui constitue un complément, qui vient s'ajouter à d'autres choses de même nature pour les compléter. (Larousse)