dimanche 30 septembre 2012

L’avenir de l’écologie avec le gouvernement Hollande


Un autre point de vue
[...] Le PS montre qu’il est capable de ne pas sous-traiter l’écologie à un autre parti que lui-même [ou sans doute qu'il en a peur]. La nomination d’une socialiste de toujours, Nicole Bricq, témoigne du fait que l’écologie devient une chose importante au sein du PS [ou que le parti ne tient pas à déléguer sur le sujet]. Et la ministre devrait avoir plus de poids qu’un écolo installé sur un strapontin. Nicole Bricq, issue de la commission des finances du palais de Luxembourg, est aussi plus à même d’articuler les contraintes budgétaires et la politique environnementale du pays. Nicole Bricq a enfin une sensibilité écolo : conseillère technique dans le cabinet de Ségolène Royal, ministre de l’Environnement en 1992-1993, elle est la seule sénatrice à rejoindre le pôle écologique lors du congrès du PS en 2008. Elle est aussi montée en première ligne sur la question des gaz et huiles de schiste.
Nicole Bricq hérite d’un périmètre assez large : « écologie, développement durable et énergie ». Il n’est pas possible d’envisager une transition écologique sans une transition énergétique réfléchie. Elle a aussi sous sa responsabilité le ministre délégué aux Transports. Il est toutefois dommage que ce périmètre élargi n’inclue pas le logement ; une « solide articulation » va être nécessaire avec la ministre en charge de l’Egalité des Territoires et du Logement, Cécile Duflot (EELV). Preuve tangible de cette improbable géographie ministérielle, Benoist Apparu, ancien ministre délégué au Logement, a dû jongler entre les deux cérémonies de passation de pouvoir des deux nouvelles ministres.
Mais la nécessaire coopération avec un membre issu directement de la mouvance écolo peut s’avérer bénéfique. Cécile Duflot est urbaniste de profession, titulaire d’un DEA de géographie, donc professionnellement préparée à sa tâche. Elle a la responsabilité d’un pôle ministériel majeur, au carrefour des crises écologiques, économiques et sociales, avec des enjeux considérables pour la vie quotidienne. La transition énergétique dépend d’un plan ambitieux d’économie d’énergie et le bâti – notamment résidentiel – représente le principal gisement de ces économies. Le Président avait d’ailleurs annoncé un vaste programme de rénovation de 600 000 logements. Il est également primordial de repenser l’aménagement du territoire, pour lutter contre l’étalement urbain, afin de minimiser les besoins de mobilité, pour réduire le trafic routier et la consommation de carburant.
Le négatif du gouvernement Hollande en matière d’écologie tient à une expression : le syndrome croissanciste. François Hollande base son quinquennat sur une volonté de croissance globale, alors que n’importe quel écolo amateur sait de source sûre qu’une croissance dans un monde finie est impossible quand on a dépassé la capacité d’accueil de l’écosystème, situation actuelle (cf. le jour du dépassement). Il y aura un grand débat public sur l’avenir de l’énergie en France, débat promis par le candidat Hollande. Mais dans un pays dominé de longue date, par le lobby nucléaire, y compris au sein du PS, le débat ne peut que tourner court. Entre les socialistes (Nicole Bricq), pro-nucléaire, et les écologistes, antinucléaire (Cécile Duflot), le dialogue est d’avance biaisé. C’est le verrou énergétique qui brisera la croissance et le nucléaire n’est qu’un pis aller, avec de l’uranium pour seulement quelques dizaines d’année.
Le président Hollande embrigade le Vert Pascal Canfin (NDLR, ancien trésorier des JNE) à ses côtés en tant que ministre délégué en charge du Développement. Or il est impossible que le Sud accède au niveau de développement de notre société, la généralisation du niveau de vie français nécessitant 3 ou 4 planètes supplémentaires, ce qui est impossible. Il est vrai que Pascal Canfin, conseiller économique d’Eva Joly pendant la campagne présidentielle, avait lui aussi défendu un « projet de budget alternatif », qualifié de « New Deal écologique et social » : il est contre une politique d’austérité ,alors qu’il nous faudrait une politique de rigueur pour moins consommer et pour moins polluer. Pascal Canfin est proche du courant de pensée économique keynésien, favorable à une relance dont on sait historiquement qu’elle ne peut aboutir qu’à la stagflation, mélange de stagnation économique (chômage) et d’inflation.
Cerise sur le gâteau, Arnaud Montebourg, habitué des journées d’été du pôle écologique du PS et chantre de la « démondialisation »  se retrouve à la tête d’un ministère improbable, pour le « redressement productif ». Il faut, dit-il, une« reconquête » des emplois industriels. Arnaud Montebourg ne sait pas encore que ce sont les entreprises qui créent les emplois, pas l’Etat. La Confédération générale des PME (CGPME) s’est d’ailleurs étonnée que le« redressement productif » de la France, qui passe selon elle par celui de la balance commerciale, soit confié à Arnaud Montebourgadepte du protectionnisme.
Enfin, Stéphane Le Foll, nommé ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, témoigne clairement de la dérive productiviste de ce gouvernement. Car qui dit « agroalimentaire » dit agro-business. Jamais encore le mot « agroalimentaire » n’avait été utilisé pour le Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture, de la Pêche, du Développement rural !
Il nous semble que, pour l’instant, le négatif l’emporte sur le positif quant au traitement de l’urgence écologique par le gouvernement Hollande. La social-démocratie croit encore que c’est la croissance économique qui pourra résoudre les problèmes sociaux. Nous espérons en les soubresauts de la planète pour faire entendre raison à ceux qui pensent que nous pouvons indéfiniment ignorer les limites de la biosphère.

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