mercredi 17 octobre 2012

Oui à la dépénalisation du cannabis ! Philippe Martin, quant à lui, dit non!


S'il existait un gouvernement qui eut intérêt à corrompre ses gouvernés, il n'aurait qu'à encourager l'usage du cannabis". Cet adage de Baudelaire (1821- 1867) est parfois cité en France comme réponse à la question "pourquoi l'usage du cannabis est-il sanctionné?". On le trouve par exemple dans une brochure d'information sur la drogue, un argumentaire antidrogue destiné aux douaniers, gendarmes et agents de police, chargés de donner des informations sur la drogue, par exemple dans les écoles dans le cadre des programmes de prévention de la drogue. Les questions fréquemment posées et leurs réponses figurent dans cette brochure. Une des questions les plus fréquemment posées est la suivante "pourquoi interdire l'usage du haschich?". La première réponse donnée par la brochure est la citation de Baudelaire. La seconde est la suivante : "le cannabis est une drogue et une drogue est un poison".
C'est une caractéristique de la politique française en matière de drogue et des programmes de prévention qui en font partie, d'utiliser des arguments aussi terrifiants pour prévenir l'usage de la drogue, car la politique française en matière de drogue est en premier lieu prohibitionniste. Non seulement cette politique est l'une des plus strictes de l'Union Européenne d'après la lettre, les textes de lois, mais elle est également stricte dans l'application de la loi (qui ne suit pas entièrement la loi, il est vrai).
Il existe depuis quelques années un débat sur la politique en matière de drogue. Si le problème du Sida n'avait pas eu une telle ampleur en France, ce débat n'aurait probablement pas eu lieu, car il est apparu à quel point une politique prohibitionniste peut être funeste. La question du Sida était déjà très sensible en France en raison de l'affaire du sang contaminé. Les choses ont un peu changé depuis : il y a distribution de méthadone -bien qu'elle se fasse encore à petite échelle - et il est désormais possible d'acheter des seringues en pharmacie. La législation sur la drogue, basée sur une loi datant de 1970, est cependant encore très sévère. La législation française ne fait pas de distinction entre le cannabis et les autres drogues, ce qui signifie que l'usage du cannabis est toujours assimilé à un délit.
Une discussion s'est engagée à ce sujet depuis environ deux ans. Le débat a été lancé par Charles Pasqua, à l'époque Ministre de l'Intérieur, probablement parce qu'il était alarmé par le fait que la loi n'était plus appliquée partout. En d'autres termes, on ne sévissait plus suffisamment à ses yeux contre l'usage de la drogue, en particulier du cannabis. La discussion qui en a découlée s'est orientée vers ce qu'on appelle la dépénalisation de l'usage du cannabis, c'est à dire que l'usage du cannabis ne serait plus sanctionné. Cela diffère donc légèrement de la légalisation du (produit) cannabis.

Sur une période d'un an, deux commissions et une organisation se sont ensuite prononcées pour la dépénalisation de l'usage du cannabis : L'Association Nationale des Intervenants en Toxicomanie (ANIT), le Comité Consultatif National d'Ethique (CCNE) et la Commission Henrion. Cette dernière (dite la "commission des sages") avait été nommée sous le gouvernement Balladur pour rédiger un rapport sur la politique en matière de drogue. Ce gouvernement, ainsi que le gouvernement Juppé et le nouveau Président de la République Jacques Chirac, semblent ne pas vouloir ou ne pas oser adopter ces recomman-dations.
Le présent rapport donne une vue d'ensemble de la situation en matière de cannabis en France. Tout d'abord, dans le chapitre 1, le sujet est précisé. Qu'est-ce que le cannabis en France, d'où provient-il, comment fonctionnent ses circuits de trafic, etc... Les chiffres de prévalence du cannabis disponibles sont présentés au chapitre 2. Les chapitres 3 et 4 aborderont ensuite la législation française, la mise en oeuvre de cette politique et les tension entre les deux. Le chapitre 5 approfondira ce qui a déjà été abordé dans l'introduction, le débat sur la situation actuelle.
Différentes sources ont été consultées pour rédiger ce rapport. En premier lieu de nombreux documents, tels que des livres et articles scientifiques, des rap-ports officiels et des articles de presse. D'autre part, de nombreux enregistrements de programmes de télévision traitant de la drogue et de la politique en matière de drogue ont été étudiés. Enfin, nous avons effectué de nombreux entretiens et interviews, avec (entre autres) des médecins, des intervenants sociaux, des éducateurs de rue, des scientifiques, des avocats, des fonctionnaires de police, des magistrats et des consommateurs de cannabis.

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